Limoune

Diviser sans régner

Ne sachant pas ce qu ‘il se passera demain en sortant du boulot,  ne sachant pas à quel point les images et les cris joueront sur mes idées, ni quel effet auront la lacrymo et le ramadan sur mes émotions,  je laisse, au risque de déplaire, une trace de ce que furent mes pensées suite à la manifestation d’hier sur l’avenue Bourguiba et au sit-in du jour face à l’assemblée constitutionnelle.

Légitime, le gouvernement qui nous représente, ne l’est plus. Et, ce n’est pas l’assassinat du député Mohammed Brahmi qui l’a rendu illégitime. Lors des élections constituantes, les citoyens tunisiens ont donné à la Troïka un mandat d’un an, avec pour mission d’écrire une Constitution et d’organiser les prochaines élections présidentielles. Deux ans plus tard, le délais est dépassé, la Constitution n’est qu’au stade de brouillon contestable et la tenue des élections est sans cesse repoussée. La légitimité de l’assemblée constituante, dont se sont retirés 52 députés de l’opposition, est contestée et contestable.

La dissolution de cet organe ainsi que la chute du gouvernement actuel sont aujourd’hui exigés par une partie des manifestants d’hier et par les sit-iners, qui se relaient devant l’assemblée constituante à Bardo. Une dissolution, et après ? Après, un gouvernement de salut national aurait en charge les missions dans lesquelles la Troïka a échoué.

Si les manifestations sont légitimes, je doute de la légitimité d’un gouvernement de salut national qui exclurait les partis au pouvoir qui, qu’on le veuille ou non, ont des adeptes.

Je ne suis pas Nahdaouiste

Je ne l’ai jamais été, d’ailleurs telle n’est pas la question. La question est la suivante : comment pouvons-nous exclure du jeu politique un parti auquel une partie de l’électorat, bien qu’amoindrie, a encore confiance. L’erreur qui doit être évitée est de ne pas reproduire celle d’Ennahda qui a divisé les citoyens de son pays sans régner. Je condamne avec fermeté la violence policière d’hier, d’aujourd’hui et peut-être celle de demain, mais celle-ci ne doit pas nous aveugler. Pour construire, il ne suffit pas de tourner une assiette endommagée, en faisant des nahdaouistes une minorité rejetée. Depuis l’arrivée de la Troïka au pouvoir, le peuple se divise petit à petit, ne restons pas figés sur ces divisions pour avancer.

Au royaume des marionnettes, aucun membre de la Troïka n’a aujourd’hui de crédit. En crise de légitimité, le parti Ennahda ne remportera jamais le scrutin si le gouvernement en place daigne un jour organiser des élections. Par les voix de l’urne ou celles de la rue, le gouvernement de demain ne sera pas celui de ce soir.

Je souhaite une excellente nuit à chaque citoyen tunisien et que puissent être nos voix, nos choix, nos voies dignes et responsables.


Deuil de la République – حداد الجمهورية

Je ne pensais pas que le deuil pouvait s’écrire mais le besoin de s’exprimer est difficile à refouler en ce jour de drame national.

استيقظنا صباح عيد الجمهورية رافعين اعلام تونسية لكن لم يدم الاحساس بالافتخار طويلا اثر الاعلام عن حادثة اغتيال الشهيد محمد البراهمي نائب حزب « الشعب » امام منزله تحت انظار اطفاله

Nos drapeaux aux fenêtres - © Limoune
Nos drapeaux aux fenêtres – Ariana – Tunis – © Limoune

و هذه الحادثة تذكرالشعب التونسي  بعملية اغتيال الشهيد شكري بلعيد المحامي و المناضل التونسي يوم 6 فيفري 2013

.تبقى اعلامنا مرفوعة عاليا فوق المنازل لكننا نعبر سخطنا في كل الجمهورية التونسية

Nous nous sommes réveillés levant fièrement nos drapeaux tunisiens en ce jour de la fête de la République, mais le matin tournait à peine son dos que le député du parti Al-Shaab (le peuple)  Mohammed Brahmi a été lâchement assassiné devant son domicile, sous les yeux de sa famille.

Même scénario qu’en février 2013 lors de l’assassinat de l’avocat et opposant Chokri Belaïd.

Nos drapeaux restent accrochés à nos fenêtres, mais notre indignation se manifeste dans l’ensemble du pays.

يرحمه الله


ZooM sur Nous – Être acteur de nous-même

L’idée n’est pas de se victimiser, mais de dénoncer. L’idée n’est pas de diaboliser, mais d’aspirer à un vivre ensemble. Le collectif Zoom sur nous que nous venons de constituer s’empare de l’outil vidéo pour s’exprimer. La première prise de position s’attaque à l’islamophobie.

Pour la première fois, sur ce blog, Limoune –  ليمون parlera à la 1ère personne du pluriel. Celle qui privilégie le « je » pour insister sur le fait que ses écrits n’engagent que sa personne, se permet aujourd’hui d’emprunter le « nous » pour parler au nom du collectif Zoom sur nous.

A notre tour

Les musulmans sont souvent représentés à l’écran, mais nous, membres du collectif, refusons le regard porté par les médias dominants sur toute une communauté. Munis de bonne volonté, mais de peu de moyens, une mini-caméra, une connexion internet, une échelle et des cartons, nous avons décidé de faire d’un écran 4*12 notre champ d’action. Reprenant les stigmates véhiculés sur l’islam, nous dénonçons un traitement arbitraire de l’information et de la fiction qui s’immisce et s’infiltre dans notre subconscient faisant du préjugé une norme.

Nous rejetons la généralisation, la stigmatisation, cette perception erronée de l’individu qui constitue un biais à la rencontre, à l’expérience humaine. Nous refusons le stigmate, que nous n’intérioriseront pas, la colonisation mentale et l’infériorisation. Zoom sur nous a été constitué afin de porter notre voix contre le pouvoir illégitime du dominant qui définit l’autre et de nous définir nous-même. Nous souhaitons être acteur de nous-même, en pointant délibérément la camera sur nous- même.

A bas le « vous », vive le « je », le « tu » et le « nous ». Zoom sur nous.

Fervent croyant et défenseur du vivre ensemble, le collectif tente de se regarder et de regarder nos sociétés sans jugement. Sans ju« je »ment, nous décidons d’abord de nous retrouver, de discuter et d’accepter l’idée que l’un d’entre nous veut mettre en images. Sans ju« je »ment, nous tentons de transcender les catégories et de questionner les préjugés. Et parce que nous ne sommes pas immunisés contre ce que nous rejetons, nous caricaturons le ju« je »ment pour nous battre avec nous-même et contre nous-même. Pour nous battre avec le « je », le « tu » et le « nous », chacune de ces entités ayant été reconnues afin que nous puissions faire usage de la 1ère personne du pluriel.

Nous venons de quatre continents différents et nous vivons sur quatre continents différents. Notre lieu de naissance ne prédestine pas notre lieu de résidence. Notre lieu de résidence ne détermine pas notre identité. Nos pays sont « libres », colonisés ou décolonisés mais nous refusons de poser un regard colonisé sur nous-mêmes. Nous refusons l’ingérence dans notre identité.


Guadeloupe – Mali – Tunisie – Les femmes se racontent

Sexe minorée et venant de régions dominées,  les femmes du Sud – comme elles ont été arbitrairement nommées – sont rarement racontées par les propriétaires de leurs êtres, à savoir elles-mêmes. A l’initiative de Danielle,  dynamique bloggeuse camerounaise soucieuse de voir les citoyens du monde faire irruption sur les médias pour porter leurs voix sur leur moi,
les mondobloggeuses Mylène Colmar, Faty et moi-même s’associent afin d’apporter leurs regards sur la condition féminine dans leurs pays respectifs.

« Fanm doubout »

Gwadloupéyen doubout - Guadeloupéenne debout ©Mylène Colmar. Retouches Limoune
Gwadloupéyen doubout – Guadeloupéenne debout
©Mylène Colmar. Retouches Limoune

Par choix ou par obligation, la femme guadeloupéenne que présente Mylène Colmar est une femme courageuse sur laquelle repose toute une société. Ravie de pouvoir décrire et définir la femme doubout et poto mitan,

« Doubout » pour forte, courageuse, extraordinaire dans ce qu’elle entreprend et surtout déterminée à surpasser toute adversité. Et, bien souvent, à « doubout » est associé « poto mitan », pour désigner le rôle de pilier occupé par la femme au sein du foyer familial, et par extension au sein de notre société.

Mylène n’en reste pas moins prudente dans son billet afin de laisser une place aux femmes dont on tait leurs existences susceptibles de faire de l’ombre au mythe. Femme célibataire, femme battue, femme violée, elles restent les témoins d’une égalité à extirper. Et c’est Axelle Kaulanjan-Diamant, Femme. Caribéenne. Créole, à qui Mylène laisse la parole, qui nous explique le paradoxe de la condition féminine en Guadeloupe.

« L’une de nos contradictions majeures, c’est que la Guadeloupe est une société matrifocale, sans pour autant être matriarcale. La majorité des familles guadeloupéennes reposent essentiellement sur les épaules de la femme dite poto-mitan, alors que l’égalité hommes/femmes en Guadeloupe est loin d’être exemplaire… »

 Empowerment féministe par l’éducation à Bamako

Si la place des femmes dans la société semble de tout temps avoir été reconnue en Guadeloupe, celle des filles et des femmes dans les écoles au Mali n’a pas toujours été un acquis. Faty évoque la scolarisation des filles à travers son billet dans lequel elle donne à découvrir le Lycée des jeunes filles à Bamako.

Un lycée qui fascine. Il m’a plût dès l’entrée. J’en avais déjà entendu parler, notamment par ma cousine Fatou Sacko qui l’a fréquenté. Mon grand-frère aussi y a fait son stage de fin d’année de l’ENSUP. Ils m’ont parlé de jeunes filles élégantes, intelligentes, turbulentes, belles. Pratiquement l’Elite féminine malienne sort de ce lycée.

Lors de la période coloniale, seul « 1% des filles inscrites arrivaient en CE2 » (3ème année primaire) mais le taux de scolarité n’augmentera que légèrement à l’ouverture du collège moderne des filles de Bamako. En 1958, l’établissement se transforme en lycée et verra son taux de scolarisation augmenter, tout comme celui du pays. Aujourd’hui, ce taux de scolarisation n’est pas la plus grande préoccupation de ce lycée d’élite, attaché à son taux de réussite.

[…] le lycée des filles de Bamako est entré dans les mêmes travers que connaissent tous les établissements scolaires maliens  avec notamment la baisse des niveaux. Les taux de passage au bac sont la preuve. Des élèves n’ayant aucun gout pour les études malgré le parquet de professeurs chevronnés qui y sont.

D’une génération à une autre dans un village tunisien

Manifestation pour la dignité en Tunisie. ©Limoune
Manifestation pour la dignité en Tunisie.
©Limoune

Sakiliba Sira Diop, première bachelière malienne, a été l’une des directrices du Lycée des jeunes filles de Bamako. Elle reste surtout une figure du féminisme africain.

Nous, nous ne brûlons pas nos soutiens-gorge. Tout ce que nous voulons, c’est un peu de temps libre.

Ma grand-mère est de sa génération, mais elle a grandi dans un village et c’est seulement à l’âge de 16 ans que son père l’a laissé se rendre à l’école des jeunes filles. Le lendemain, sa mère décède et sa fille aînée – ma grand-mère – prendra sa place et son rôle. Fanm doubout, vacant d’une activité domestique à une autre, aux besoins de ses frères à ceux de son père, puis de ceux de son mari à ceux de ses enfants, du temps libre, elle n’en trouvera qu’une fois alitée, quand la douleur daignera lui laisser du répit. Cette femme qui se contenta de la vision du groupe dominant sur sa place de femme, a refusé pour ses filles la valeur sociale négative de la femme imposée par l’homme. Contrairement à elle, ses filles ont appris à lire et à écrire, et à l’obtention du baccalauréat, ma grand-mère s’est révélée être combattante pour qu’elles puissent partir étudier à l’université, bien que cela exigeait une installation en ville.

Ma grand-mère est féministe, militante pour ses filles. Sa fille – ma mère – est féministe, militante pour ses filles et pour elle-même. Sa fille – ma sœur – est féministe, militante pour elle-même et pour ses concitoyennes. Sans ma grand-mère et son combat, je n’aurai pas pu comprendre la valeur du mot féminisme. La femme tunisienne n’existe pas. Des femmes tunisiennes existent. Je n’ai parlé que de celles que je connais.


Y’a Bon Awards – Quand le racisme se classe

Il y a la France que l’on aime et celle qui nous toise. Celle qui n’a plus peur de ses discours racistes et qui affiche ses tendances xénophobes dans la sphère publique, qu’elle soit politique ou médiatique. Le temps de la soirée de lundi dernier, Les indivisibles, militants pour la reconnaissance des Français dans leur diversité, ont investi la scène du cabaret sauvage, à Paris, pour la cérémonie des Y’a Bon Awards 2013, récompensant le meilleur du pire.

Si ces personnalités ont chacune remporté

le trophée de la honte

en forme de banane – en hommage satirique au slogan raciste Y’a Bon Banania –  d’autres ne sont pas passées inaperçues. Hassen Chalghoumi, président de l’association culturelle des musulmans de Drancy,

Quand on a vu sur sa première photo de classe, que ma fille n’était entourée que de Blacks et de Beurs, on s’est dit avec ma femme qu’elle ne devait pas rester dans cette école.

Jean- René Godart, chroniqueur sportif sur France Télévision,

Beaugé, c’est un drôle de client : c’est un Antillais, donc on a toujours l’impression qu’il est un peu lent, qu’il laisse passer les choses.

Richard Dacoury, ancien basketteur présent sur le plateau, répond : « Gare aux clichés, tous les Antillais ne sont pas indolents. Ça m’ennuie un petit peu, mais bon continue je t’en prie… »

Godart reprend : « Non, mais c’est vraiment un gars que je connais très bien, c’est pour ça que je dis ça ! Et on retrouve  des attitudes similaires avec Teddy Riner ».

et Jean-Luc Mélanchon, président du Parti de gauche,

La plupart des gens vivent leur foi, ne cherchent pas à embêter les autres, ne se déguisent pas. Car moi j’ai déjà dit à des jeunes que j’ai croisé : « C’est quoi ta tenue ? Tu sors d’où ? Pourquoi tu te déguises en Afghan ? » Tu peux croire en Dieu sans te déguiser en Afghan ! […] Pour moi un déguisement c’est se foutre une calotte sur la tête, passer sa journée avec la tenue d’Afghan.

ont brillé lors de cette soirée. Le répertoire musical français a également été passé à la fourche. Nul besoin de peigne fin face à cette grossièreté dont voici deux exemples.

https://www.youtube.com/watch?v=dxW-9crC9dQ

La course au racisme

est donc toujours d’actualité et ça fait vendre, il paraît ! C’est pas moi qui le dit, c’est Christophe Barbier, directeur de la rédaction de l’Express,  qui fier d’assumer son idéologie est venu récupérer sa banane de l’an passé. Enchaînant les Unes surfant sur la haine de l’islam, il explique qu’il faut « aller un peu plus loin que le politiquement correct, quitte à se tromper »« Si vous mettez une image gentille, ils [les lecteurs] n’achètent pas », avance-t-il, ne semblant pas comprendre les revendications des Indivisibles, qui bien que présentées, de manière humoristique, lors de cette soirée, sont, en réalité, on ne peut plus sérieuses et préoccupantes.

Préoccupée, je le suis d’ailleurs. J’ai peur pour cette France. Pour cette France que j’ai rêvée quand je vois cette France de la diversité niée. Cette France qui devrait afficher une seule et même identité. Cette France où la différence est pointée, stigmatisée, dénigrée, rejetée pour mieux être suspectée. Je ne voulais pas me plaindre, ni emprunté ce ton soucieux dans ce billet. Je voudrais rire comme je le faisais lundi soir, mais plus je m’éloigne de cet espace-temps, plus il m’est difficile de ravaler mon air maussade.

Quand le racisme se classe – minorant un propos face à un autre – je crois que ça m’agace. Quand le racisme est nominé et yabonisé – étant ainsi identifié et dénoncé – je pense rejoindre l’idée. Mais, tous aussi humainement condamnables les uns que les autres – la loi française ayant préféré plancher sur une laïcité biaisée –  ces discours sont tous indignants, affligeants. Les yabonisés, nominés et affiliés qui, pour certains, prêtent aux Antillais l’indolence, ferait mieux de faire face à leur paresse intellectuelle. A une paresse humaine, qui institutionnalise, conforte et réconforte les discours racistes les plus discrets, dans les plus hautes sphères publiques.


Sri Lanka : à la recherche d’un refuge

Il ne reste plus que deux hommes, sur douze personnes, à l’atelier socio-linguistique que j’anime, à quelques heures de Paris. Deux hommes que le travail n’a pas extirpé de mon cours en journée. L’un, retraité. L’autre, réfugié. L’un, marocain arrivé en train il y a 50 ans, l’autre sri lankais débarqué il y a 150 jours. L’un, consterné, m’a lancé après l’atelier : « Y en a marre. Eux, ils arrivent, on les laisse venir sans problème. » L’autre, fatigué, m’a confié lors d’une sortie à Paris : « C’est difficile d’arriver jusqu’ici ».  

K. au Trocadéro, observant des sans-papiers subafricains se faire déloger.
K. au Trocadéro, lors d’une sortie à Paris, observant des sans-papiers sub-sahariens se faire déloger. © Limoune

K., je l’ai d’abord refusé. Cet atelier en journée est réservé aux personnes non ou peu scolarisées alors que, K., lui, était journaliste, au Sri Lanka. Basculant simultanément sa tête de haut en bas et de gauche à droite, signifiant un « oui » alors que j’en percevais un « non », cet homme réservé et peu rassuré, a fait bon usage des malentendus pour passer, depuis quatre mois, ses après-midi dans le groupe débutant A.

Un après-midi pluvieux a été le discret spectateur d’une fatigue apaisée, lors d’une sortie à Paris. K. se relâche. K. se lâche. K. s’attache. Sa voix, presque muette, marmonne en anglais une histoire que des crochets, bien trop larges, ne pourraient reconstituer. L’aiguille fine à perles, plus adaptée, n’est pas à l’aise quand il s’agit de commencer et hésite entre un début en Tanzanie ou en Arabie.

La fuite non préméditée

Né au Sri Lanka, en 1982, K. n’a gardé d’autres souvenirs qu’un pays en conflit. En guerre, de 1987 à 2001, son pays était le théâtre d’affrontements entre le gouvernement et ses citoyens tamouls. C’est dans ce contexte que K. entre à l’école, poursuit ses études au collège puis à l’université, d’où il sort diplômé en journalisme. Travaillant dans un climat tendu qui le met au devant des menaces, K. quitte le pays précipitamment en 2001. Il s’envole pour la Tanzanie, où il vivra un an et demi sans se sentir « considéré comme un esclave par une majorité cinghalaise ».

En 2002, le cessez-le-feu est convenu entre l’Etat sri lankais et le mouvement séparatiste des Tigres de la Libération du Tamoul et l’espoir renaît dans le cœur de K., ravi de pouvoir retrouver les siens. Les concessions du nouveau premier ministre Ranil Wickremesinghe rejoignent celle de l’un des chefs tamouls Anton Balasingham sur la voie de la paix. K. reprend l’avion, s’installe de nouveau chez ses parents et prend siège au sein d’une rédaction cinghalo-tamoule, toutes religions confondues. Mais, l’année 2006 pointe son nez. Un tsunami et un changement de gouvernement vont faire basculer l’ordre précaire. Le conflit reprend, là où il s’était arrêté, avec une force démesurée. De par sa fonction et ses écrits, K. est de nouveau menacé. Sa famille est inquiète pour son protégé. Elle se démène pour mettre de l’argent de côté. Mis bout à bout, les billets représentent, en 2012, la somme exigée par l’agence, chargée de l’acheminer loin de l’insécurité.

La fuite agencée

Vingt mille euros, c’est la somme que ses proches et lui-même ont dû débourser à l’agence clandestine qui envoient ses exilés à des kilomètres de l’océan indien. Certains le traverseront dangereusement pour rejoindre l’Australie. D’autres échoueront. K. a choisi l’option la plus sécurisée, mais également la plus douloureuse pour le porte-monnaie. L’Europe.

Le statut de réfugié ne pouvant pas être demandé depuis son pays d’origine, il faut à K. rejoindre un pays européen pour demander l’asile politique. Et ce, par tous les moyens, ceux s’offrant à lui étant illégaux et hors de prix. Les faux papiers délivrés en Arabie Saoudite, K. quitte les siens pour atterrir à Riadh, où il patientera sans idée du lendemain. Vingt jours plus tard, on lui remet son passeport dont une page est recouverte d’un faux visa français. Il accepte la destination et s’envole pour Paris.

Après sept mois en France, son séjour ne fait que commencer. Son faux visa a expiré. Sa demande d’asile a été envoyée. Son récépissé est son seul trophée.

Selon l’angle de vue, l’angle de vie, l’histoire est différente. Il est de notre devoir, migrants ou non, illégaux ou non, d’abolir le carcan de notre histoire personnel pour s’ouvrir et écouter celle des autres. Sans œillère, il n’est plus question de se plaindre de la présence des Sri Lankais en France au même titre que celle des étrangers en France. Je ne cesserai de le répéter, une expérience ne vaut que par et pour elle-même, mais mon aiguille fine à perles, n’a pas eu tort de s’y intéresser.


Roumanie : J’ai loupé ma migration

Quand j’ai annoncé à des amis d’amis que je partais en Roumanie, la réponse à laquelle j’ai eu droit ressemblait à ça : « T’as rien à faire ! ». Je ne connaissais pas plus qu’eux ce pays. Mais, c’est justement pour ça que je m’y rendais avec l’espoir de pouvoir les convaincre à mon retour qu’eux aussi aurait des choses à y faire, dont la principale serait d’enterrer leurs préjugés.

© Limoune
© Limoune

De retour, le feedback que j’ai à leur proposer n’est autre qu’une frustration. Non pas la frustration de ne pas avoir trouvé de piles, comme quelqu’un dont on taira le nom, l’avait naïvement supposé. Ni celle de rester bouche bée face à des boîtes françaises délocalisés dans des bâtiments désamiantés. Mais plutôt la frustration d’avoir loupé ma migration. Ce n’est pas en France que j’aurai dû migrer.

En ces temps de dérèglement climatique qui m’obligent à porter une doudoune à quelques jours du mois de juin, même les oiseaux migrateurs auraient rebroussés chemin à l’approche de Paris pour trouver refuge du côté de Timosoara. J’aurai dû suivre l’exemple de l’un de ces oiseaux et différent aurait été mon présent.

Les vêtements d'hiver et le téléphone d'une paysanne déposés pour pouvoir moudre son maïs dans le moulin public. © Limoune
Même à la campagne, les Roumaines déposent leurs vêtements d’hiver. A l’entrée d’un moulin public. © Limoune

Ce pays aurait fait de moi une contorsionniste de renom. Jonglant avec les langues, dévoilant mes talents de souplesse entre la Serbie et la Hongrie, je maîtriserais avec brio l’art de l’adaptation. Mes amis auraient été serbes, allemands, polonais, rroms, améniens, tunisiens, irakiens… Même si mes voisins ne sont pas pour la majorité européens, je comprendrais le sens du mot « Europe ».

Je passerais mes week-ends à Chile Nerei aux côtés de paysans roumains qui ont su conserver une agriculture traditionnelle, une architecture et des tenues vestimentaires qui diffèrent d’un village à un autre.

Je me permettrais d’aller au théâtre et même à l’Opéra. Sans bouille aristo, ni chignon haut, mon modeste portefeuille et mon style claquette pourront m’offrir les joies de ces activités populaires.

Je ne penserais pas que les Roumains nettoient tous des pare-brises. Que la Roumanie ressemble à un immense hangar désaffecté. Je n’aurais pas de préjugés sur la Roumanie. Sur les Roumains. Et peu sur les Rroms.

Last but not least, j’aurais coupé le cordon ombilical qui me relie au colonisateur de mes grands-parents. Mais, à ce qu’on dit, on ne refait pas le monde avec des si.


Roumanie – J’ai rencontré une légende

Voila bientôt quatre ans que j ‘entends parler de cette femme qui m ‘a touchée avant même de l’avoir croisée. Je ne me doutais pas encore que j’allais pouvoir la rencontrer en Roumanie en ce mois de mai et plonger ainsi entre histoires et Histoire.

©Limoune

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Maria, c ‘est son nom. Mama mia, c ‘est celui qu’ont choisi ses petits-enfants et celui que j’ai adopté. Née en 1942, Mama mia va bientôt fêter ses 71 ans. Sa mémoire est intacte et elle va pouvoir m’en faire une démonstration. Rythmant son récit par des « a fost » (« c ‘etait » en roumain), Mama mia m’a ouvert les portes de son foyer, celle de sa cuisine, mais aussi celle de son passé. Le présent ouvre avec précision et sans erreur les tiroirs et armoires pour nous laisser plonger dans les années 50.

Une enfance marquée par la déportation

En 1951, alors âgée de 9 ans, Mama mia est déportée avec sa famille dans la plaine de Bărăgan, au sud de la Roumanie. Si « [ses] parents étaient des paysans travaillant terre et bétail », ils étaient avant tout considérés par le gouvernement communiste de Petru Groza, comme des propriétaires terriens. Leurs biens devaient donc être nationalisés. Et un système de déportation a été instauré par le décret 83 du 2 mars 1949, visant à déplacer, entre autres, les familles de propriétaires vers le sud-est du pays, peuplant ainsi cette région alors soumise à la sécheresse et aux inondations.

C’est ainsi que deux ans plus tard, Mama mia, chargée dans un wagon de marchandises, embarque vers une destination inconnue avec ses parents et les seuls biens qu’ils ont pu emmener avec eux : un porc et trois moutons. Après quelques jours de trajet, ils s’installèrent dans des champs. « Il n’y avait rien. Nous vivions dans des maisons creusées sous terre. » explique-t-elle. Puis, par leurs propres moyens, les parents de Mama mia, tout comme les autres déportés, se mirent à construire des maisons de fortune à l’aide de torchis, de chaume et de roseaux.  Mama mia vécu dans l’une de ces maisons jusqu’à l’âge de 15 ans.

Une maison de déportés dans le sud-est de la Roumanie. ©Limoune
Une maison de déportés dans le sud-est de la Roumanie. ©Limoune

Au delà du stigmate identitaire

« Dès que nous en avons eu le droit en 1956, nous sommes directement revenus dans notre village, près de Timosoara« , raconte Mama mia. « Nous n’avions rien là-bas », poursuit-elle. Si Mama mia n’est pas retournée dans la plaine de Bărăgan, elle a appris à connaître la région de Timosoara, à découvrir la Roumanie et à parcourir l’Europe aux côtés de son mari.

Ces nouveaux voyages en train qu’elle continue à faire moins aisément pour rendre visite à sa petite-fille installée à Bucarest pourraient peut-être lui faire oublier les wagons à marchandises. Mais son récit mémoriel, lui, n’a pas été effacé. Désormais, accompagné par d’autres, ce témoignage fait partie de tout un récit de vie que Mama mia dévoile avec plaisir et amour.

Les photos de maisons en torchis sont alors recouvertes par celles d’un voyage pour lequel Mama mia a dû prendre l’avion pour l’unique fois de sa vie. Amman, Jerash et Pétra sont les décors des retrouvailles de Mama mia avec la famille d’un ami jordanien, connu il y a trente ans à Timosoara, alors qu’il y était étudiant avec sa fille.

La compensation de l’État, par le moyen d’une pension, se voulait suffisante. Le parcours de réparation qu’a pris le risque d’emprunter Mama mia, semé de reconnaissance et de richesses humaines, était bien plus courageux.


Liebster Award : personne n’y échappe

Manque de bol, j’ai été nominée. Manque de pot, je vais devoir me confier. Il semble que personne ne puisse y échapper. Sinath, Pascaline, Rendodjo et Salma m’ont nominée au Liebster Award. Un concours destiné à faire connaître et découvrir les blogs que l’on aime. Son chiffre d’or : le 11.

Après avoir cité le ou les blogs de celles qui m’ont nominée, je vais devoir dévoiler 11 faits me concernant, répondre aux 11 questions des blogueuses qui m’ont nominée et proposer 11 questions auxquelles devront répondre mes 11 nominés, parmi lesquels ne devront pas figurer les blogueurs qui m’ont nominée.

le chiffre 11
©Limoune

Les dés sont lancés. C’est à moi de jouer.

1. Je suis une optimiste dont l’ennemi est l’espoir.

2. Me rendre compte que le monde est un pañuelo aussi petit qu’un mouchoir reste mon petit bonheur.

3. J’aime les boîtes dans lesquelles on peut ranger des objets et des idées, mais pas celles avec lesquelles on classe les individus.

4. Si quelqu’un m’avait un jour dit que je deviendrai blogueuse, je lui aurai pouffé au visage.

5. Je suis une ludophile. Oui, je suis l’ami du jeu. Du plus futile au plus engagé, en passant par le stratégique. Et comme toute joueuse qui se respecte, je n’aime ni tricheurs, ni tricheuses.

6. Paysanne refoulée, j’ai fait des champs de mes grands-parents mon terrain de jeu préféré. Lors des récoltes, figues, raisins, amandes et olives me procurent un bien-être inégalé.

7. J’aime la mloukhiya. Egyptienne, palestinienne et surtout tunisienne ! Je déteste les préjugés des Algériens non initiés à l’égard de ce plat, qui est l’incarnation même de la patience. Cinq heures de cuisson en moyenne à feu doux.

8. Je suis une Old School. J’écoute Fayrouz, Hedi Jouini, Mercedes Sosa, Victor Jara, Tracy Chapman et Cat Stevens.

9. Je prends mes photos avec un argentique sur une pellicule Noir et Blanc et j’éprouve un plaisir fou à les développer en chambre noire.

10. Je ne me soigne plus avec des médicaments mais avec des huiles. Ma grand-mère aurait été fière de moi.

11. Plus jeune, j’ai bloqué ma sœur dans une valise en jouant à cache-cache. J’ai cassé ses dents en jouant au volley avec un trousseau de clés. Mais ça, tout le monde s’en fout.

Place aux questions de Sinath, Pascaline, Rendodjo et Salma

Après l’exercice libre, je n’ai pu m’empêcher d’ajouter mes propres règles en mixant les questions de ces dames, faisant ainsi honneur à chacune des mondobloggueuses qui m’ont nominée. C’est de la triche, je sais. Liebster Award n’est pas un jeu, vous le savez.

Dites-nous quelque chose sur vous que personne ne sait. Je suis mon unique confidente.

Que pensez-vous de l’aventure Mondoblog ? Waww ! Une incroyable communauté aux personnalités, aux humours, aux discours, aux intérêts et aux goûts culinaires variés qui s’est constituée et qui perdure au-delà des frontières.

Quelle est la plus importante chose que vous aimeriez faire dans votre vie ? Partir jusqu’à la Mecque avec un âne.

Qu’est ce qui vous en empêche ou comment pourriez-vous y parvenir ? Je ne peux me rendre seule en Arabie Saoudite. Ses actuels propriétaires ont restreint l’entrée aux femmes non accompagnées par un mohram (généralement le mari, le père ou le frère) à l’âge de 45 ans au minimum. Le deuxième obstacle est l’obtention d’un visa pour mon futur âne (F.A.) dans chacun des pays traversés. Les vaccins en bataille règleront les questions de visa, mais, pour ce qui est de mon cas, à moins d’attendre mes quarante-cinq ans, j’ai plusieurs options. Convaincre mon père de me comprendre. Convaincre mon frère de me suivre. Ou bien trouver un éleveur d’ânes. Le convaincre de m’épouser. Le convaincre de me comprendre. Le convaincre de me suivre. Pfff !

Et si vous devriez être un animal, lequel seriez-vous ? Un âne, bien sûr !

Blogger rime-t-il toujours avec journalisme citoyen ? Oui. Tu ne la vois pas la rime ? J’ai mis du temps à comprendre ce qu’était le journalisme citoyen, avant de me rendre compte que c’est ce font beaucoup d’entre nous avec leurs blogs.

Présentez-vous ainsi que votre blog  ? Je suis Limoune. Un peu schizophrène.  Un jour tendre, un jour acide. Mon blog Jeu des citrons est à mon image : un défouloir dans le foutoir (c’était le nom de ancien blog). Avec une ligne blogoriale, que j’essaie de respecter. #halteauxpréjugés.

Quel est le défaut de votre corps que vous n’aimez pas ? Les pieds. C’est le défaut du corps de toute personne. Un pied, c’est moche !

Où voulez-vous que se déroule la saison 3 de Mondoblog et pourquoi ? En Tunisie, pour avoir l’opportunité de vous accueillir, tous !

Comment m’avez-vous connu et que pensez-vous de moi ? [Question de Salma] Un soir, derrière un ordinateur d’une salle informatique dans une auberge sénégalaise, j’ai aperçu ton regard accusateur. 36h plus tard, le sourire détendu, j’ai appris à t’aimer

Désormais pouvez-vous vous passer de Mondoblog ?pourquoi ? Là est le problème ! En dépit de mes efforts pour avoir une utilisation modérée et maîtrisée du réseau des réseaux, depuis Dakar, Mondoblog me fait perdre tout discernement. Je suis devenue une mondoblogueuse compulsive. Mais, je me soigne.

Inversons les rôles

Quel message voudrais-tu passer aux Tunisiens ?

Que veux dire pour toi la solidarité ?

Et le sens de l’engagement ?

Jusqu’à quel point pourrais-tu défendre tes idées ?

Blogguer sans internet, c’est possible ?

Es-tu assis(e) sur une chaise ?

As-tu un balcon ?

Dis-moi ce qu’il y a dans ton frigo.

Portes-tu des boucles d’oreilles ?

Tes chaussettes sont plutôt blanches ou noires ?

Honnêtement, ce questionnaire t’a-t-il blasé ?

La relève

Berlinoir, nominé dans la catégorie « De l’humour entre les lignes »

Faty, nominée dans la catégorie « Miroir, miroir »

Josiane, nominée dans la catégorie « Engagement et délicatesse »

Bouba, nominé dans la catégorie « Raï et diplomatie »

Aurore, nominé dans la catégorie « Douceur et palabres »

Z, nominé dans la catégorie « Les Simpsons en Tunisie »

Nathalie Setara, nominée dans la catégorie « Soon together in Kaboul »

Olfa Riahi, nominée dans la catégorie « Investigation et Tunisie »

We are all Palestinians, nominée dans la catégorie « Paix et solidarité »

Benjamin Wiacek, nominé dans la catégorie « Ma voix au Yémen »

Christine Delphy, nomimée dans la catégorie « Féminisme sans racisme »


La Constitution ne reconnait pas la diversité des figues tunisiennes

Racisme. Rejet de l’Autre. Discriminations. Pour une fois, du côté de chez moi, le sujet a pas mal été relayé. Alors, face à la question commune  « Qu’est-ce-qui peut désunir une diversité ? » proposée par Danielle aux mondobloggueurs, Limoune –  ليمون s’intéresse à son assiette de figues tunisiennes.

Ces jours-ci, à ma grande joie, médias et twittosphère tunisienne ont su se faire le relais de discriminations ciblées et de revendications minorées. Le 1er mai, lors de la fête internationale du travail, les Noirs tunisiens scandaient « Tunisie libre, racisme dehors » […]

[…] pendant que les Berbères s’affichaient au cœur de la manifestation des travailleurs et des diplomés-chomeurs avec le drapeau Amazigh […]

[…] et que les premières figues pointaient leurs nez dans le champ de mon grand-père paternel. Les bourjassottes noires montraient enfin leurs formes violettes tandis que les blanches, en général plus précoces, affichaient déjà leur couleur verte en avril.

A partir de la mi-juillet, au petit déjeuner, bourjassottes noires et blanches rempliront mon assiette. Et, elles la rempliront inégalement. Chaque été, les figues vertes dominent mon assiette.

©Limoune
©Limoune

C’est d’ailleurs l’argument récupéré par ceux qui délaissent la violette. Par ceux qui lui préfèrent la verte, la « normale » , la dominante qui impose sa norme. Par ceux qui se rabattront sur la flasque, la molle, puis la métisse et parfois même la violette quand toutes les vertes auront trouvé leur place dans l’estomac des membres du foyer.

La Constitution ne me représente pas

La Constitution, son brouillon, ne mentionnera pas la bourjassotte noire, ni la berbérophone, ni tout autre figue minorée. Son brouillon vous dira qu’il ne se préoccupe pas non plus de la bourjassotte blanche, la « normale », la dominante,  parce qu’il n’est question, vous dira-t-il, que de figues ! Les bourjassottes minoritaires sont des figues comme les autres. Il n’y a pas de discrimination entre les figues.

Les bourjassotes minortaires ont raison de s’inquiéter. Après la révolution, elles ont enfin pu se constituer en association et revendiquer leur besoin d’exister, d’être protégées. Mais cette même révolution a vu tolérance et modération s’étouffer.

La religion de la Tunisie est l’Islam et sa langue arabe. Certes ! Nier les autres composantes de la Tunisie, c’est leur refuser reconnaissance, droits et protection. Certes !